L’UIA-IROL appelle la République islamique d’Iran à annuler la décision de condamnation à mort du rappeur Toomaj Salehi et encourage les avocat.es du monde entier à se mobiliser contre cette exécution.
Le 24 avril 2024, le Tribunal révolutionnaire d’Ispahan a condamné à mort le rappeur Toomaj Salehi, âgé de 33 ans, pour avoir soutenu dans ses chansons et sur les réseaux sociaux le mouvement de contestation déclenché par la mort de Mahsa Amini détenue par la police des mœurs qui lui reprochait d’avoir enfreint le code vestimentaire strict imposé aux femmes iraniennes.
Le rappeur avait déjà été arrêté en septembre 2021 pour « propagande contre le régime » et condamné à une peine de six mois d’emprisonnement et une amende.
Après la mort de Mahsa Amini le 16 septembre 2022, le rappeur a rejoint le mouvement de contestation « Femme. Vie. Liberté. » et a informé les militant.es des lieux de manifestation à travers les réseaux sociaux.
En octobre 2022, Toomaj Salehi a été arrêté pour son soutien au mouvement et placé en détention où il aurait été soumis à des pratiques constitutives de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants.
Le 10 juillet 2023, Toomaj Salehi a été condamné par la Première Branche du Tribunal révolutionnaire d’Ispahan à six ans et trois mois d’emprisonnement en application de l’article 286 du Code pénal islamique réprimant certains crimes liés à la sécurité nationale ou à l’ordre public.
Le 18 novembre 2023, la Cour suprême iranienne a annulé cette peine et a renvoyé l’affaire devant le tribunal de première instance, en prononçant la libération sous caution du rappeur.
A sa libération, Toomaj Salehi a diffusé une vidéo en ligne dans laquelle il accusait les forces de l’ordre de l’avoir soumis à des mauvais traitements au cours de sa détention, ce qui a entrainé son arrestation le 30 novembre 2023.
Le 18 avril 2024, le Tribunal révolutionnaire d’Ispahan a ouvert un nouveau procès sous les charges notamment de « incitation à la sédition », « rassemblement », « conspiration », « appel aux émeutes ». Toomaj Salehi a été reconnu coupable de « corruption sur Terre » et condamné à mort.
Son avocat, Amir Raeesian, indique qu’il fera appel de cette décision. Il considère qu’elle comporte d’importantes erreurs de droit notamment au regard de la décision de la Cour Suprême de novembre 2023.
Selon Human Rights Watch, depuis le début de la répression des manifestations, les autorités judiciaires iraniennes ont drastiquement accru le recours aux accusations liées à la sécurité nationale, à l’issue de procès manifestement inéquitables. Vingt-cinq condamnations à mort en lien avec les manifestations ont été prononcées. Depuis le début du mois d’avril 2024, le gouvernement a exécuté huit personnes condamnées à mort dans le cadre de manifestations, tandis que la Cour Suprême en a annulé onze. Parmi les personnes arrêtés lors des manifestations figurait un autre rappeur iranien d’origine kurde, Saman Seyedi, connu sous le nom de « Yasin », condamné à mort pour « hostilité contre l’Etat » et « possession d’armes et complot visant à menacer la sécurité nationale ». Le Cour suprême a annulé la peine et le 21 avril 2024, la 15ème Chambre du Tribunal révolutionnaire de Téhéran a condamné le rappeur à cinq années d’emprisonnement.
En 2023, Amnesty international a recensé l’exécution de 853 détenu.es, dont plus de la moitié sont des personnes qui avaient été condamnées pour des infractions liées à la drogue. Le nombre d’exécutions en 2023 est le plus élevé depuis 2015 et marque une augmentation de 48% par rapport à 2022 et de 172% par rapport à 2021. Depuis le début de 2024, 95 exécutions ont été répertoriées en Iran.
Amnesty International a révélé que les autorités iraniennes ont massivement recours à la peine capitale afin de répandre la peur au sein de la population et de resserrer leur emprise sur le pouvoir, à la suite du soulèvement « Femme. Vie. Liberté » qui s’est déroulé de septembre à décembre 2022.
Le Ministère des affaires étrangères français a condamné « avec vigueur cette décision qui s’ajoute aux nombreuses autres condamnations à mort et exécutions injustifiables liées aux manifestations de l’automne 2022 en Iran ».
L’UIA-IROL condamne fermement la décision prononcée à l’encontre de Toomaj Salehi et enjoint à la République islamique d’Iran d’annuler le prononcé de cette peine capitale. Elle appelle les avocat.es du monde entier à se mobiliser contre cette exécution et à se battre pour le respect de la liberté d’expression, le droit à un procès équitable et à lutter en faveur de l’abolition universelle de la peine de mort.
L’UIA-IROL rappelle la portée non-dissuasive de la peine de mort et que ce châtiment constitue, en raison du syndrome du couloir de la mort subi par les condamné.es dans l’attente de leur exécution, une « torture irréversible ». La lutte pour l’abolition universelle de la peine de mort est un objectif prioritaire de la défense des droits humains et l'UIA continuera à s'engager activement dans les efforts visant à abolir la peine de mort en Iran et dans le monde entier.